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Alors que l’inquiétude grandit en Occident face à la situation en Ukraine, les propos d’Emmanuel Macron sur un éventuel envoi de troupes dans le pays reflète une peur de l’échec. Une analyse de Fiodor Loukianov.

Le président français Emmanuel Macron a déclaré que le pays n’enverrait pas de troupes en Ukraine dans un avenir proche. Il avait auparavant indiqué que les dirigeants des pays occidentaux avaient discuté de cette question mais n’étaient pas parvenus à un accord.

L’évolution de la crise ukrainienne a eu des conséquences paradoxales. Deux ans après le début de la phase la plus aiguë, l’Europe occidentale s’est retrouvée au cœur de la confrontation.

Non seulement du point de vue des coûts qu’elle a dû supporter – discutés dès le début – mais également de celui de l’éventualité d’un conflit militaire avec la Russie qui est actuellement évoquée de manière beaucoup plus virulente en Europe que de l’autre côté de l’Atlantique. Et la France en est l’instigatrice.

Pour beaucoup, la déclaration du président Macron sur l’envoi possible de forces de l’OTAN dans la zone de combats a semblé spontanée. Pourtant, une semaine plus tard, Paris insiste sur son caractère délibéré et bien réfléchi.

La France appelle depuis des années à considérer «l’autonomie stratégique» de l’Europe, mais peu de gens s’attendaient à une telle manière de la réaliser.

Toutefois, si l’autonomie est bien l’objectif, comment peut-elle se concrétiser aujourd’hui ?

Se détacher du principal allié (les États-Unis) dans le contexte d’une confrontation militaire et politique aiguë, qui exige une consolidation, est absurde. Dans ce cas, l’autonomie implique probablement la capacité de faire cavalier seul dans la définition des tâches militaires et politiques et de guider le Nouveau Monde, pas l’inverse.

Pourquoi l’UE pourrait être le plus grand perdant du conflit ukrainien 10 mars 2024 Source: AFP Réunion des alliés européens de Kiev, le 26 février à l’Elysée (image d’illustration). Suivez RT en français sur Telegram Alors que l’inquiétude grandit en Occident face à la situation en Ukraine, les propos d’Emmanuel Macron sur un éventuel envoi de troupes dans le pays reflète une peur de l’échec. Une analyse de Fiodor Loukianov.

Cet article a été initialement publié par Rossiskaïa Gazeta. Fiodor Loukianov est rédacteur en chef de «La Russie dans la politique mondiale», chef du présidium du Conseil de politique étrangère et de défense et directeur de recherche du Club de discussion international Valdaï.

Le président français Emmanuel Macron a déclaré que le pays n’enverrait pas de troupes en Ukraine dans un avenir proche.

Il avait auparavant indiqué que les dirigeants des pays occidentaux avaient discuté de cette question mais n’étaient pas parvenus à un accord. L’évolution de la crise ukrainienne a eu des conséquences paradoxales.

Deux ans après le début de la phase la plus aiguë, l’Europe occidentale s’est retrouvée au cœur de la confrontation.

Non seulement du point de vue des coûts qu’elle a dû supporter – discutés dès le début – mais également de celui de l’éventualité d’un conflit militaire avec la Russie qui est actuellement évoquée de manière beaucoup plus virulente en Europe que de l’autre côté de l’Atlantique. Et la France en est l’instigatrice.

Pour beaucoup, la déclaration du président Macron sur l’envoi possible de forces de l’OTAN dans la zone de combats a semblé spontanée.

Pourtant, une semaine plus tard, Paris insiste sur son caractère délibéré et bien réfléchi. La France appelle depuis des années à considérer «l’autonomie stratégique» de l’Europe, mais peu de gens s’attendaient à une telle manière de la réaliser.

Toutefois, si l’autonomie est bien l’objectif, comment peut-elle se concrétiser aujourd’hui ? Se détacher du principal allié (les États-Unis) dans le contexte d’une confrontation militaire et politique aiguë, qui exige une consolidation, est absurde.

Dans ce cas, l’autonomie implique probablement la capacité de faire cavalier seul dans la définition des tâches militaires et politiques et de guider le Nouveau Monde, pas l’inverse.

Lire aussi Comment le conflit entre la Russie et l’Ukraine doit-il finir ?

On peut se rappeler la campagne menée il y a 13 ans, lorsque c’étaient les Européens, et surtout les Français, qui étaient à l’origine de l’intervention de l’OTAN dans la guerre civile en Libye.

À l’époque, il y avait plusieurs façons d’expliquer les motivations de Paris: des raisons purement personnelles du président Nicolas Sarkozy (des rumeurs sur ses liens financiers et politiques avec Mouammar Kadhafi circulaient depuis longtemps) au désir de remporter une victoire facile sur un ennemi faible pour renforcer le prestige en général et l’influence française en Afrique.

Londres (David Cameron) et Rome (Silvio Berlusconi) avaient eu des considérations similaires.

Le président américain Barack Obama, qui, à la différence de la plupart de ses prédécesseurs, ne se distinguait pas par un bellicisme exacerbé, n’était pas très enthousiaste à l’idée d’une intervention. La formule surprenante de «diriger de l’arrière» a émergé : Washington soutient ses alliés, mais les laisse libres de prendre des décisions.

Les États-Unis n’ont pas réussi à rester à l’écart, car la situation a commencé à faire penser non pas à un succès fulgurant de l’OTAN, mais à la crise du canal de Suez de 1956. À cette époque-là, Paris et Londres avaient également essayé d’agir à leurs risques et périls pour contrer la perte de crédibilité dans le contexte de l’effondrement des empires coloniaux.

Au lieu de cela, la dernière page du chapitre colonial a été tournée et ni l’un ni l’autre n’a atteint ses objectifs, à la grande satisfaction de l’URSS mais aussi des États-Unis. Les deux nouvelles superpuissances pensaient le temps venu pour les anciens grands de prendre leur retraite.

En Libye, l’échec des alliés n’était pas opportun pour Washington, il a donc été obligé d’y prendre part.

Le résultat est bien connu : ils ont obtenu ce qu’ils voulaient (le régime a été renversé, Kadhafi a été sauvagement tué), mais au prix de l’effondrement du pays et de l’émergence d’un nouveau foyer d’instabilité chronique.

L’Europe veut en découdre  Il ne sert à rien de comparer cette situation-là et la situation actuelle, car la structure et l’envergure sont différentes. Mais la volonté européenne d’en découdre, dont les fondements ne sont pas forcément très clairs, reste là.

À présent même en Allemagne, qui avait préféré rester en retrait au moment de l’Irak et de la Libye. D’où vient cette intrépidité ?

Récemment pourtant, l’incantation constante était d’empêcher l’OTAN d’être entraînée dans un conflit direct avec la Russie ce qui pourrait déclencher une guerre nucléaire.

Et maintenant, tout à coup, Paris commence à parler d’une «ambiguïté stratégique», d’un jeu astucieux pour confondre Poutine et lui faire peur de prendre des décisions qui pourraient entraîner des conséquences irréversibles : que ce soit lui qui ait peur des prochaines étapes, pas nous…

Dans d’autres capitales, on ne s’y met pas encore, mais un groupe de pays prêts à croiser le fer avec Moscou commence à prendre forme.

L’ambiguïté est un problème bien connu, qui n’est pas étranger à la Russie dans cette campagne. Dès le début, les objectifs russes ont été formulés de manière descriptive plutôt que concrète, ce qui est le cas jusqu’à ce jour.

Alors que la question d’une modification des frontières est publiquement soulevée aux plus hautes tribunes, les Européens, qui se sont fait la guerre pendant des siècles pour ce genre de modifications, l’interprètent dans un esprit purement expansionniste.

Et même si, dans notre cas, il s’agit spécifiquement des frontières qui ont divisé un territoire culturellement et historiquement unifié à la suite de l’effondrement de l’URSS, l’interprétation expansionniste du public extérieur est compréhensible.

Aucune raison de croire que la Russie s’abstiendrait de répondre L’ambiguïté européenne implique probablement une intensification de l’assistance militaire substantielle à l’Ukraine sans l’annoncer, mais sans en cacher non plus les signes d’expansion.

Les risques sont considérables car il n’y a aucune raison de croire que la Russie s’abstiendrait de répondre d’une manière ou d’une autre si elle voyait une raison de le faire. La peur associée à la Russie n’est pas nouvelle pour l’Europe et, historiquement, elle est très sincère à sa manière, on ne peut donc pas l’ignorer.

D’autant plus qu’après la guerre froide, les Européens pensaient pouvoir en toute bonne conscience oublier les problèmes antérieurs, et nous y revoilà. Mais osons suggérer que la réaction européenne actuelle et l’escalade de la menace russe sont également liées à un autre facteur : la prise de conscience que c’est l’UE qui pourrait être la principale perdante dans le conflit en cours.

L’écart entre les demandes de la population et les priorités de la classe politique, à en juger par les sondages, ne cesse de se creuser. Et on ne sait pas quoi attendre du partenaire principal. Du coup l’ambiguïté est omniprésente. Il ne reste plus qu’à en faire le cœur de sa propre politique. Et à insister dessus.

La diplomatie européenne démissionnaire  À l’approche de l’élection présidentielle, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a invité les ambassadeurs de l’UE à une réunion, mais ceux-ci ont refusé.

Selon le ministre, les autorités russes ont accumulé suffisamment d’informations sur la manière dont les missions diplomatiques des pays européens «se préparent» aux élections, élaborent des projets visant à soutenir les opposants qui sont hors-système et s’ingèrent dans les affaires intérieures de notre pays.

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Source : RT en français

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